Dans un arrêt du 6 novembre 2019 qui a déjà fait la une de la presse médicale, le Conseil d’Etat a déclaré contraire au droit de l’Union Européenne – et plus précisément à l’article 56 du Traité sur le Fonctionnement de l’UE – l’interdiction générale et absolue de publicité pour les médecins.
La solution était évidente. Le contexte ayant permis d’y aboutir est un peu plus surprenant. Pour mémoire, depuis que la Cour de Justice de l’Union Européenne, certaines Chambres Disciplinaire ont continué à faire usage de cette interdiction pour sanctionner des professionnels médicaux. D’aucuns auraient pu penser – et moi le premier – que l’annulation des textes prohibant la publicité interviendrait dans le cadre d’un pourvoi contre une décision de sanction. Mais pas du tout. « L’annulation » de l’article R4127-25 du Code de la Santé Publique – qui interdit la publicité aux médecins – fait suite à une demande d’abrogation adressée par un professionnel à la Ministre de la Santé. Il est ici intéressant de noter que la demande d’abrogation portait sur la totalité de l’article R4127-19 – dont le premier alinéa pose le principe de non-commercialité de la médecine – et non pas exclusivement sur la question de la publicité. Pour ne pas avoir à statuer sur le 1er alinéa, le Conseil d’Etat s’est fondé sur les termes de la demande. Termes non reproduits dans la décision… la médecine restera donc non commerciale.
Un autre point méritant l’attention est lié à la portée de la décision. Le Conseil d’Etat n’a pas annulé l’interdiction de publicité – il n’en avait pas le pouvoir – mais simplement mis l’Etat dans l’obligation de procéder à l’abrogation du texte. En pratique, cela pourrait prendre un certain temps. Pendant ce temps, toute sanction disciplinaire fondée sur ce texte devrait être annulée. Ce qui pose la question des sanctions prononcées dans le laps de temps séparant la décision de la CJUE précitée et celle du Conseil d’Etat. Malheureusement, celles-ci subsistent tant qu’un recours n’est pas introduit.
Un dernier point auquel il devrait être prêté attention dans les mois à venir : les autres professions de santé, médicales ou paramédicales, sauront-elles tirées les conséquences de cet arrêt du 6 novembre 2019, ou tenteront-elles la politique de l’autruche ?