Un salarié peut, au titre de son droit à la preuve, obtenir copie de données personnelles relatives à ses collègues.
La décision ne manquera pas d’étonner – pour ne pas dire choquer – les purs et durs du RGPD. Mais elle émane directement de la Cour de Cassation et paraît donc délicate à contester (Soc., 8 mars 2023, n° 21-12492). Et surtout, elle intervient moins d’une semaine après que la CJUE a pris une position similaire.
Les hautes juridictions se sont fondées sur le caractère non absolu du droit à la protection des données pour faire primer le droit à la preuve. Cette utilisation « négative » de ce droit fondamental, restreignant les droits d’un tiers, est innovante. En effet, traditionnellement, cette caractéristique est plutôt opposée à la personne concernée pour limiter ses propres droits. Ainsi le Conseil d’Etat préserve-t-il les droits des agents hospitaliers en refusant aux patients de connaître l’identité des personnes ayant accédé à leur dossier médical (CE, 8 février 2023, CH Montreuil-sur-Mer, n° 455887).
En pratique, la mise en oeuvre d’une telle décision ne manquera pas de poser des maux de tête à l’employeur. Le transfert des données doit en effet être encadré et, surtout, les salariés – dont les données vont être transférées – informés…
En revanche, le risque d’une asymétrie dans les droits de la défense, entre un employé libre d’obtenir les données de tiers et un employeur interdit de produire spontanément de telles données du fait du principe de confidentialité a été écarté par le juge européen. Celui-ci semble en effet permettre de produire les données relatives à des tiers, dès lors que cela reste une mesure nécessaire et proportionnée aux exigences de sa défense.