Toute personne traitant des données à caractère personnel vous le dira. La principale difficulté résultant du droit de la protection des données est le recueil du consentement.

Alors quand il s’agit de données à caractère personnel relatives à la santé, cela devient rapidement la « croix et la bannière », si vous permettez l’expression. Le professionnel de santé doit ainsi recueillir le consentement à la réalisation de l’acte de diagnostic, de soins ou de prévention qu’il envisage, la collecte et l’hébergement des données à caractère personnel relatives au patient, l’accès à son historique des remboursements, le partage des informations médicales avec d’autres professionnels participant à la prise en charge…

Et cet inventaire à la Prévert n’est nullement exhaustif.

 

En matière de don du sang, un établissement de santé a considéré que le recueil du consentement au traitement de données à caractère personnel n’était pas une obligation.

Il a donc recueilli et conservé une donnée sensible, l’orientation sexuelle du donneur. En l’occurrence, le donneur s’est donc vu opposer un refus, lors de son 2nd don, du fait de son homosexualité.

 

Le donneur a déposé plainte pour discrimination à raison de l’orientation sexuelle. Et l’affaire est remontée jusqu’à la Cour de Cassation (Crim., 8 juillet 2015, n° 13-86267).

Le grief de discrimination a rapidement été écarté. En revanche, les juges ont recherché si la responsabilité de l’établissement de santé ne pouvait pas être engagée sur la base des dispositions pénales relatives à la loi Informatique et Libertés, du fait de l’absence de consentement.

La Cour de Cassation a alors recherché si les exceptions à l’obligation de recueil du consentement prévu par la loi Informatique et Libertés ne pouvaient pas trouver application. En l’occurrence, les juges ont estimé que la collecte des données relatives à l’orientation sexuelle des donneurs de sang entrait dans le cadre de l’exception permettant la collecte sans consentement, lorsqu’elle est réalisée aux fins de la médecine préventive, des diagnostics médicaux, de l’administration de soins ou de traitements, ou de la gestion de services de santé, et mis en oeuvre par un membre d’une profession de santé, ou par une autre personne soumise au secret professionnel. Ici, les juges n’hésitent pas à forcer le cadre, puisqu’un donneur de sang n’est pas le bénéficiaire d’un acte de médecine préventive, de diagnostics médicaux, de soins ou de traitements.

Ils ont par ailleurs précisé que la mise en œuvre de cette exception par l’hôpital constituait une mesure légitime, nécessaire à la protection de la santé, définie par la loi avec suffisamment de précision pour éviter l’arbitraire, et de nature à assurer, en l’état, entre le respect de la vie privée et la sauvegarde de la santé publique, une conciliation qui n’est pas déséquilibrée.

 

Je vous imagine déjà vous réjouir en vous disant, ça y est, le consentement, c’est fini.

Non. Bien au contraire. Ou plus précisément, pas totalement.

 

En matière sanitaire, les difficultés relatives au consentement sont liées aux dispositions du Code de la Santé Publique – et non pas à la loi Informatique et Libertés, dont l’application peut être écartée, dans certaines circonstances et sous certaines réserves.

C’est en effet ce Code qui exige le recueil systématique du consentement – expressément ou tacitement (cas de la non-opposition).

 

Maintenant, soyons honnêtes, la faute n’incombe pas au seul législateur.

Cet arrêt de la Cour de Cassation met en évidence le hiatus existant entre la CNIL, la pratique et son appréciation par le juge répressif.

En effet, là où la première se montre extrêmement stricte en matière de consentement, le juge semble enclin à faire preuve de plus de réalisme, en acceptant la mise en œuvre – dans des situations légitimes – des exceptions au consentement prévues dans la loi Informatique et Libertés.

 

Espérons que la prochaine adoption du Règlement Général relatif à la Protection des Données (RGPD), texte d’application directe et uniforme sur le territoire de l’Union Européenne, libéralisera la question du consentement.